Lorsqu’une personne s’exprime dans sa langue – une langue autre que la nôtre – et que les médias nous en rendent compte, il nous est donné une traduction. Pour le lecteur, il y a alors une quasi absence de conscience d’un original. Pour l’auditeur ou le téléspectateur, il en va un peu différemment. Il entend souvent un petit quelque chose de ce que dit la personne mais sa voix est couverte par la traduction avec un niveau sonore supérieur.

Nous ne pouvons, trop souvent, accéder aux différences entre le dire original et sa traduction (à l’exception de quelques mentions et notes de traduction laissées intentionnellement en bas de page dans les journaux ou revues). Pour celui à qui l’on donne une traduction, la parole, la voix, l’expression ne sont pas celles de celui qui s’exprime mais celles du traducteur. Il les reçoit avec le statut d’original et pourtant, nous savons bien qu’il n’en est rien. Si bonne soit la traduction, elle fait écran.

Dans notre espace mondialisé, pourquoi les médias ne donnent-ils pas un accès à l’original et à la traduction ? Nous sommes de plus en plus nombreux à parler plusieurs langues, a minima l’anglais imposé dans nos écoles. Je rêve qu’un jour, au moins sur France Culture, on puisse entendre les personnes s’exprimer dans leur langue et qu’après – et non en simultané – on ait la traduction. Nous pourrions alors entendre cette tension irréductible entre nos langues, cette tension si riche et enrichissante.