épigraphie

5 P pour écrire l’histoire de l’humanité

Pierre

Lorsque l’homme commence à écrire, il grave dans la pierre. Ce matériau est disponible partout en grande quantité. Mais il n’est pas très pratique, vous en conviendrez. Il est parfois très dur, souvent lourd… On a du mal à imaginer un roman de Victor Hugo dans une version pierre ! Mais il a aussi quelques avantages. Il est particulièrement pérenne et c’est ainsi que les témoins de cet âge ne manquent pas.

Pierre gravée trouvée à Erebuni

Pierre gravée trouvée à Erebuni

Papyrus

Dans le delta du Nil, l’Égypte disposait d’une plante qui lui assura longtemps le monopole de la fabrication du principal support de l’écrit d’une période estimée de 2600 avant JC à 650 après JC. Les tiges de la plante, débitées en lamelles étroites, étaient disposées perpendiculairement les unes sur les autres pour former une surface homogène. Après avoir été compressées, martelées et polies, les feuilles obtenues étaient collées les unes aux autres. Les rouleaux obtenus pouvaient avoir une longueur allant jusqu’à 15 mètres. La largeur n’excédait en revanche pas 40 centimètres. Par exemple, le papyrus d’Iena sur lequel on a retrouvé des fragments du cinquième livre de l’Adversus Haereses d’Irénée de Lyon a une largeur de 23 à 24 cm et une longeur dépassant probablement le mètre.

C’est sous cette forme de rouleau, appelé Volumen, que les commerçants vendaient le précieux papyrus dans tout l’Empire. Un tel support était fragile, c’est pourquoi il était aussi utilisé soit en feuille découpée dans les rouleaux. Ces feuilles étaient assemblées en codex, des livres en cahier obtenu par pliage.

En Europe, c’est au VIIIe s. que disparait l’usage trimillénaire du papyrus avec l’invasion arabe.

Parchemin

Lors de la guerre qui opposa l’Egypte au royaume de Pergame (en grec Πέργαμον), nous raconte Pline l’Ancien (livre XIII ch. XXI), le roi égyptien Ptolémée Epiphane fit interdire tout commerce de paryrus avec l’ennemi. Eumène II (197-158), roi de Pergame (actuellement Bergama en Turquie), venait de fonder une bibliothèque : la cité développa alors l’usage de la peau de chèvre ou de mouton.

« Cet objet, dont l’immortalité des hommes dépend, devint d’un usage commun », Pline l’Ancien.

Papier

L’invention du papier, tel que nous le connaissons, est chinoise. Je ne vous raconte pas la suite, … vous connaissez.

Avec le papyrus et le parchemin, le papier brûle. Combien de grandes bibliothèques n’ont-elles pas disparu en fumée ? Même la bibliothèque secrête d’Yvan le Terrible, celle qu’il avait fait placé sous terre à l’abri des incendies, aurait été la proie des flamme.

PC

Et le 5e P est celui du PC, celui de l’ère de l’ordinateur personnel. Ce P est le plus immatériel, celui dont la pérennité est sans cesse compromise. Il est le premier qui ne peut pas exister seul. Sans électricité, il n’est pas possible d’écrire ou de lire. Nous en remettrons à ce P pour la postérité de nos écrits ?

Il se dégage comme une loi, plus le support est pratique, moins il est pérenne.


Une inscription grecque de Garni, en Arménie

Les inscriptions grecques sont très rares en Arménie. En voici une de bonne dimension.


Un peu d’épigraphie arménienne, page 6

Pour cette sixième page, passons maintenant à la troisième lettre : la lettre kim de l’alphabet mesropien, Գ.

a) Moi, Grégoire

Cette lettre apparait deux fois dans le nom de l’Illuminateur de l’Arménie. Nous la trouvons à l’initiale et au milieu du nom de Krikor (ou Grigor). Voici une première inscription où on peut lire ԵՍԳՐԻԳՈՐ, c’est à dire Ես Գրիգոր qui signifie « Moi, Grégoire »

b) Dadivank : Krikor

Dans cette autre inscription, on lit simplement le prénom Krikor, ԳՐԻԳՈՐ.

c) Noravank

J’ai déjà parlé de cette inscription qui figure aux pieds de l’ange Gabriel sur le tympan de l’église de Noravank. On distingue parfaitement le kim à l’initiale : Գ(Ա)ԲՐԻԷԼ.

Je n’ai pas trouvé, pour l’instant, d’exemple d’un kim pris dans une ligature avec ou sans badiv. En avez-vous déjà rencontré ?


Un peu d’épigraphie arménienne, page 5

Après avoir considéré la lettre pen Բ seule, je vous propose des compositions. Commençons avec S(OUR)P Ս(ՈՒՐ)Բ, ce qui signifie saint. Seules lettres initiale et finale sont gravées.

a) Etchmiadzin b) Geghard c) Geghard, 1855 d) Sainte Hripsimé e) Kecharis, Tsaghkadzor

On remarque que le badiv est présent en b, c, d et e où il couvre les deux lettres. Les quatre badivs ont des formes différentes. Les trois premiers sont tildés, b simplement avec des courbes, c avec une inflexion centrale très appuyée et d avec un point central qui a la forme d’une tête de clou. Le quatrième et dernier badiv est droit. En b, c et d les deux lettres sont, par économie ou par coquetterie, réunies pour former un système graphique complexe.

f) Etchmiadzin g) Etchmiadzin

Dans la même inscription, on trouve ici le nom au nominatif et au génitif. C’est l’occasion d’y observer la variation introduite par le graveur. Il semble qu’il ne veuille avoir que deux lettres sous le badiv, à cette fin, en f, il a bien dissocié l’initiale et la finale du mot. En g, elles sont réunies et permettent l’ajout du Յ qui marque le

h) Noravank

Cette dernière inscription figure aux pieds de l’ange Gabriel, à la droite de la Mère de Dieu assise et portant l’enfant Jésus, sur le tympan de l’église de Noravank. On y lit dont tout simplement le nom de l’ange Գ(Ա)ԲՐԻԷԼ. C’est un bel exemple d’ornementation complexe. Le graveur a réussi à inscrire 6 lettres sous le badiv, lequel n’est pas fait d’un simple trait mais d’un bel entrelacs.


Un peu d’épigraphie arménienne, page 4

Après les trois premières pages (1, 2 et 3) d’épigraphies arméniennes consacrées au aïp Ա, la première lettre de l’alphabet, je vous propose naturellement la deuxième lettre : pen Բ.

Commençons simplement par la lettre seule.

a) Ani b) Dadivank c) 1543 Khachkar, Etchmiadzin d) Geghard e) Etchmiadzin

a) Sur le mur d’une l’église à Ani, vers le Xe siècle

b) Sur le mur de l’église de Dadivank (XIIIe siècle), dans le Haut-Karabach

c) Sur un khachkar daté de 1543, conservé dans les jardins d’Etchmiadzin

d) Sur le mur de l’église de Geghard, une inscription relativement récente

e) Sous le campanile, à l’entrée de l’Eglise Mère d’Etchmiadzin, une inscription relativement récente

Peu à peu le caractère se dessine plus nettement comme nous le connaissons aujourd’hui. Si vous suivez les variations de la barre médiane de la lettre, vous reconnaissez progressivement la majuscule dans sa forme actuelle.


Un peu d’épigraphie arménienne, page 3

Voyons aujourd’hui comment sont notées les dates. Celles-ci se présentent sous différentes formes.

a) Noravank

Les deux premières lettres ԹՎ, surmontées d’un badiv, sont le mot թուական qui signifie « date ». Les trois lettres ՉՁԸ qui suivent sont la date. Չ vaut 700, Ձ vaut 80 et Ը vaut 8. Ce qui nous donne 788 selon le calendrier arménien, soit 788 + 561 = 1349 dans le calendrier occidental.

b) Garni

On reconnait bien les deux lettres ԹՎ, surmontées d’un badiv. Elles sont précédées de la date. Celle-ci est ։ՅԽԶ։ avec de part et d’autre des lettres le signe « : ». Յ vaut 300, Խ vaut 40 et Զ vaut 6. La date est donc le nombre 346 auquel il faut ajouter 551 pour obtenir 897 dans notre calendrier. Il y a deux différences avec le premier exemple a). Premièrement, le mot « date » est ici placé après le nombre ; deuxièmement, le nombre est placé entre « : ».


Un peu d’épigraphie arménienne, page 2

Voici une suite logique à ma première page publiée la semaine dernière. Je vous propose de poursuivre avec le mot Dieu que nous déclinons ici aux génitif, datif et ablatif singulier : Ա(ստուածո)յ notons qu’ici la finale « յ » est en majuscule « Յ », ce qui est normal puisque les lettres gravées sont pratiquement toujours des onciales (majuscules).

a) Geghard b) sainte Hripsimé à Etchmiadzin c) sainte Hripsimé à Etchmiadzin d) sainte Astvatsatsin à Noravank

a) Mur de l’église de Geghard

b) et c) Mur de l’église sainte Hripsimé à Etchmiadzin

d) Tympan de l’église sainte Astvatsatsin à Noravank

Le badiv est très lisible au-dessus des deux lettres aip et hi. Sa forme, assez rudimentaire en a), s’arrondit en b) et c). En d), le badiv est particulièrement ornementé.


Un peu d’épigraphie arménienne, page 1

Les églises arméniennes sont des livres ouverts pour les épigraphes. Leurs murs sont couverts de cette belle écriture dont la légende dit que c’est Dieu qui l’inspira à Mesrop à l’orée du Ve siècle. Alors commençons justement avec le nom de Dieu. Il est rarement écrit en entier et c’est généralement sous sa forme abrégée qu’on le trouve. Voici quelques exemples :

a) Dadivank b) Saints-Archanges c) Vank

a) Eglise de Dadivank (XIIIe siècle), dans le Haut-Karabach

b) Eglise des Saints-Archanges (XIIIe siècle), dans le quartier arménien de Jérusalem.

c) Cathédrale de Vank (XVII-XVIIIe siècle), dans le quartier de la Nouvelle-Djoulfa, à proximité d’Ispahan, en Iran.

En arménien, au nominatif et à l’accusatif singulier, Dieu s’écrit Աստուած. Gravé, on ne conserve que l’initiale en majuscule surmonté d’un badiv (a,b,c) et la finale ծ en minuscule est soit intégrée dans l’initiale Ա (a), séparée (b) ou absente (c).

A suivre …

NB : L’épigraphie est l’étude des inscriptions anciennes conservées sur des matières durables. Généralement, il s’agit de textes gravés dans la pierre, mais ça peut être aussi dans le métal ou l’argile.


Garni, inscription d’une pierre tombale

Cette inscription figure en tête d’une pierre tombale posée à même le sol (coordonnées pour Google Maps : 40.112838, 44.729515), à quelques dizaines de mètres du temple de Garni (Գառնի en arménien). Ce site est situé à l’est d’Erevan, la capitale de l’Arménie. Ce temple païen est l’un des tout derniers vestiges grecs de l’époque pré-chrétienne.

Cette belle inscription, gravée de remarquables onciales, se lit comme ceci :

։ՅԽԶ։ԹՎ։ Ի ՔՍ
ՓՈԽՑ ՏՐ ՄԱՇԴ

Il faut noter la présence de badiv sur presque tous les groupes de lettres. Le badiv est cette notation spécifique de l’arménien classique qui ressemble à un trait horizontal et signifie que le mot a été abrévié. Le mot arménien badiv se traduit par honneur. Pour figurer les badiv, je place des parenthèses sur les mots surmontés de cette notation.

։ՅԽԶ։(ԹՎ)։ Ի (ՔՍ)
(ՓՈԽՑ) (ՏՐ) (ՄԱՇԴ)

Si nous complétons, en ajoutant des minuscules italisées et en gras, nous avons :

։ՅԽԶ։ԹՎ։ Ի ՔրիստոՍ
ՓՈԽեՑաւ ՏէՐ ՄԱՇԴոց

Ce qui s’analyse ainsi :

  • ։ՅԽԶ։ [de part et d’autre des lettres on trouve « : », il s’agit donc d’un nombre, en l’occurrence 346. Il s’agit d’une date selon l’ancien calendrier. Il faut donc ajouter 551 pour obtenir 897 dans notre calendrier]
  • ԹՎ։ [forme de թուական = (à la) date]
  • Ի [prép. dans +Acc]
  • ՔրիստոՍ [Christ]
  • ՓՈԽեՑաւ [verbe փոխեմ = trépasser, décéder, aoriste médio-passif 3e pers.sg.]
  • ՏէՐ [seigneur]
  • ՄԱՇԴոց [Machtots]

La traduction de cette épitaphe d’une extrême sobriété est :

En l’an 346, le Seigneur Machtots est décédé dans le Christ.

Le Catholicos Machtots Ier (833 – 898) était originaire du village de Elivart, dans la province du Kotayk. Ce même village, trois siècles auparavant, avait donné naissance à un autre catholicos : Movses II (574-604). Son pontificat ne dura que 7 mois (de 897 à 898). Il était le 49e catholicos.

Pour en savoir plus sur le Catholicos Machtots :

NBHL = Nor baúgirì haykazean lezui, 1837, Nouveau dictionnaire de la langue arménienne

Merci à Agnès Ouzounian pour ses conseils qui m’ont aidé dans la rédaction de cette page.


Web 2.0 et épigraphie arménienne, suite

Après avoir réuni un groupe de photographes qui publient leurs photographies sur Flickr et sont intéressés pour partager leurs photos sur le thème de l’épigraphie arménienne, je viens de découvrir un nouvel outil. Il s’agit d’un site très web 2.0 qui utilise une RIA (application internet riche) pour permettre de créer des albums photos ou des livres illustrés. Cet outil, c’est Mixbook.

Je me suis tout de suite créer un compte pour concevoir un album pour y placer mes photos. Mixbook est bien conçu et a nouer des partenariats multiples. Ainsi, j’ai pu par exemple importer les photos que j’avais téléchargé dans Flickr. Il m’a suffit pour cela d’autoriser Mixbook et se connecter à mon compte Flickr.

La solution permet de commencer avec la fabrication d’un pur album photo. Mais il est aussi possible de faire beaucoup sophistiqué et de créer des livres numériques car on peut ajouter du texte. Seule ombre pour le moment, nos caractères accentués du français ne passe pas.


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