C’est en 1795 que le décret portant sur la création de l’Ecole des langues orientales est publié. Sa lecture mérite le détour.
histoire
La Bibliothèque d’Alexandrie, telle qu’Irénée de Lyon en parle au 2e siècle
La fameuse bibliothèque d’Alexandrie qui fut fondée en 288 avant notre ère fut plusieurs fois détruite et reconstruite. La dernière destruction eut lieu en 642 ap. J.C.
Entre 180 et 190, Irénée de Lyon, 2e évêque de la ville, natif de Smyrne, écrivait « Πρὸ τοῦ γὰρ Ῥωμαίους κρατῦναι τὴν ἀρχὴν αὐτῶν, ἔτι τῶν Μακεδόνων τὴν Ἀσίαν κατεχόντων, Πτολεμαῖος ὁ Λάγου φιλοτιμούμενος τὴν ὑπ´ αὐτοῦ κατεσκευασμένην βιβλιοθήκην ἐν Ἀλεξανδρείᾳ κοσμῆσαι τοῖς πάντων ἀνθρώπων συγγράμμασιν ὅσα γε σπουδαῖα ὑπῆρχεν » (avant que les Romains n’eussent établi leur empire, alors que les Macédoniens tenaient encore l’Asie sous leur pouvoir, Ptolémée, fils de Lagos, qui avait fondé à Alexandrie une bibliothèque et ambitionnait de l’orner des meilleurs écrits de tous les hommes – trad. Adelin Rousseau SC. 211 p.401-403).
On ne sait pas si Irénée s’est rendu à Alexandrie. Les renseignements d’Irénée sont ceux de tout lettré de son époque. La Bibliothèque est fameuse, elle a déjà plus de quatre siècles d’existence.
Eusèbe de Césarée a repris plus tard la citation d’Irénée dans le 5e livre de son « Histoire ecclésiastique » (livre V, 8.) sans rien ajouter de plus. Il faut noter que la citation grecque (ci-dessus) n’aurait pas été possible sans le texte d’Eusèbe. En effet, les originaux grecs d’Irénée ont tous été perdus.
En 2004, un séminaire a été organisé dans le cadre du Projet Alexandrie, un projet de recherche initié par la Bibliotheca Alexandrina pour l’étude et la documentation de l’ancienne Bibliothèque d’Alexandrie. La BA possède de nombreuses collections. L’une d’elle est dédiée aux manuscrits originaux, et aux premiers livres imprimés. Il est possible d’en faire une petite visite virtuelle. Malheureusement, on aimerait en voir beaucoup plus (le virtual browser n’est pas fonctionnel). Le site ne propose pas de lecture de manuscrit numérisé comme, par exemple, ce que la BnF propose avec Gallica.
Une monographie est accessible en ligne. Elle est signée Patrice Giorgiadès, son titre est « l’étrange destin de la bibliothèque d’Alexandrie« .
5 P pour écrire l’histoire de l’humanité
Pierre
Lorsque l’homme commence à écrire, il grave dans la pierre. Ce matériau est disponible partout en grande quantité. Mais il n’est pas très pratique, vous en conviendrez. Il est parfois très dur, souvent lourd… On a du mal à imaginer un roman de Victor Hugo dans une version pierre ! Mais il a aussi quelques avantages. Il est particulièrement pérenne et c’est ainsi que les témoins de cet âge ne manquent pas.
Papyrus
Dans le delta du Nil, l’Égypte disposait d’une plante qui lui assura longtemps le monopole de la fabrication du principal support de l’écrit d’une période estimée de 2600 avant JC à 650 après JC. Les tiges de la plante, débitées en lamelles étroites, étaient disposées perpendiculairement les unes sur les autres pour former une surface homogène. Après avoir été compressées, martelées et polies, les feuilles obtenues étaient collées les unes aux autres. Les rouleaux obtenus pouvaient avoir une longueur allant jusqu’à 15 mètres. La largeur n’excédait en revanche pas 40 centimètres. Par exemple, le papyrus d’Iena sur lequel on a retrouvé des fragments du cinquième livre de l’Adversus Haereses d’Irénée de Lyon a une largeur de 23 à 24 cm et une longeur dépassant probablement le mètre.
C’est sous cette forme de rouleau, appelé Volumen, que les commerçants vendaient le précieux papyrus dans tout l’Empire. Un tel support était fragile, c’est pourquoi il était aussi utilisé soit en feuille découpée dans les rouleaux. Ces feuilles étaient assemblées en codex, des livres en cahier obtenu par pliage.
En Europe, c’est au VIIIe s. que disparait l’usage trimillénaire du papyrus avec l’invasion arabe.
Parchemin
Lors de la guerre qui opposa l’Egypte au royaume de Pergame (en grec Πέργαμον), nous raconte Pline l’Ancien (livre XIII ch. XXI), le roi égyptien Ptolémée Epiphane fit interdire tout commerce de paryrus avec l’ennemi. Eumène II (197-158), roi de Pergame (actuellement Bergama en Turquie), venait de fonder une bibliothèque : la cité développa alors l’usage de la peau de chèvre ou de mouton.
« Cet objet, dont l’immortalité des hommes dépend, devint d’un usage commun », Pline l’Ancien.
Papier
L’invention du papier, tel que nous le connaissons, est chinoise. Je ne vous raconte pas la suite, … vous connaissez.
Avec le papyrus et le parchemin, le papier brûle. Combien de grandes bibliothèques n’ont-elles pas disparu en fumée ? Même la bibliothèque secrête d’Yvan le Terrible, celle qu’il avait fait placé sous terre à l’abri des incendies, aurait été la proie des flamme.
PC
Et le 5e P est celui du PC, celui de l’ère de l’ordinateur personnel. Ce P est le plus immatériel, celui dont la pérennité est sans cesse compromise. Il est le premier qui ne peut pas exister seul. Sans électricité, il n’est pas possible d’écrire ou de lire. Nous en remettrons à ce P pour la postérité de nos écrits ?
Il se dégage comme une loi, plus le support est pratique, moins il est pérenne.
1512 – 2012 : 500 ans d’imprimerie arménienne
Il y a exactement cinq siècles, c’est à Venise que fut publié le premier livre arménien imprimé avec des caractères mobiles de Gutenberg. L’imprimeur s’appelait Hakob Meghapart, Հակոբ Մեղապարտ.
Le titre du livre est « Urbatagirk », en arménien : Ուրբաթագիրք. Si on décompose le nom, on a Ուրբաթ (vendredi) + ա + գիրք (livre). La signification est simple, il s’agit du « livre du vendredi ». Le livre contient 124 pages imprimées en rouge et noir. 24 d’entre-elles sont colorées. Il s’agit d’un recueil de prières, qui comprend des remèdes pour les maladies et des citations de Grégoire de Narek.
En 1512-1513, Hakob Meghapart publie cinq livres.
Urbatagirk / Ուրբաթագիրք / Livre du vendredi
(je n’ai pas encore de photo)
Pataragatetr / Պատարագատետր / Missel
Aghtark / Աղթարք / Traité d’astronomie
Le Parzatumar Hayoc’ est un ouvrage composé de cinq parties : 1) Un traité des signes du zodiaque, 2) un traité sur le premier jour de l’année, 3) un traité sur les rêves, 4) un traité sur la naissance des enfants et 5) un traité sur le mouvement du corps humain. Au recto de la première feuille, on peut lire : « Almanach des Arméniens », suit le calendrier de l’an 961 de l’ère arménienne (= 1512). On en trouve un exemplaire dans la bibliothèque des PP. Mekithariste à Vienne et un autre dans le Couvent de St. Jacques à Jérusalem. En 2006, il s’en est vendu un au prix de 60.000 $.
(je n’ai pas encore de photo)
Parzatumar / Պարզատումար / Calendrier
Tagharan / Տաղարան / Livre de chants
Si vous avez des informations complémentaires, n’hésitez pas à me laisser un message. Merci.
Comment le peuple compose des chansons (2), par le R.P. Komitas
Sous l’effet de l’animation, l’air se développa peu à peu, se modifia de la façon suivante :
Aux 6me, 7me et 8 me formes la mesure changea, car le mouvement de la danse s’était accéléré. Au moment où la 8me forme était chantée, un deuxième groupe entra dans la danse, au cours même du chant. Une nouvelle coryphée passa à la tête de la danse. Se font coryphées les jeunes filles ou les garçons doués d’une belle voix et connus pour leur talent de chanter ; quand un de ces coryphées s’avance, le précédent lui cède la place et se tient à sa gauche.
(Cet article fait partie de la série “L’auteur de la chanson populaire“)
Comment le peuple compose des chansons (1), par le R.P. Komitas
L’année dernière j’étais allé en villégiature au monastère de Haridj (dans le Chirak, à 28 verstes d’Alexandropol, sur l’Aragatz). C’était lors des fêtes de la Transfiguration ; des pèlerins en foule étaient arrivés. Les jeunes paysannes, les nouvelles mariées et les garçons dansent, improvisent des chansons et chantent, comme il est de coutume aux pèlerinages. J’étais déjà sur le toit dallé du bâtiment, crayon et papier à la main, et j’attendais l’arrivée des chanteuses. Cette fois, je devais y assister dès le commencement, ce qui ne m’avait pas été possible jusque là, car on commence la danse en pleine nuit et lorsque j’arrivais le matin, je n’entendais que des chansons déjà composées. J’ai vu et senti alors combien je m’étais trompé.
Tout d’abord, quatre personnes s’avancèrent et formèrent la ronde. Elles firent quelques tours, en silence, à pas symétriques, vers la droite, comme il est d’usage au début de la danse. La meilleure chanteuse du groupe se mit à chanter le refrain suivant :
« Amann Tello, Tello !
Sirounn Tello, Tello ! »
« Pitié, Tello, Tello ! Charmante Tello, Tello ! » sur l’air que voici :
Le chœur le répéta identiquement, et la coryphée chanta la première partie de la chanson et le premier vers du refrain :
le chœur le répéta ; la coryphée chanta la deuxième partie de la chanson et le deuxième vers du refrain, avec une petite addition :
(Cet article fait suite à « L’auteur de la chanson populaire« . Je publierai la suite …)
L’auteur de la chanson populaire, par le R.P. Komitas
Demandez au paysan Arménien le nom de l’endroit où telle chanson a pris naissance ; qu’il le sache ou non, il vous nomme un village. Demandez le nom de celui qui l’a composée ; il désigne le chanteur en vogue de ce village ; quand vous vous adressez à celui-ci, il donne un autre nom ou hausse les épaules. Le nom de l’auteur est connu dans les chansons qui ont pour sujet l’histoire d’un homme déchiré par une hyène, ou noyé dans la mer, ou étouffé par la bourrasque, ou assassiné, ou dont la fille a été enlevée, etc. De pareilles chansons sont composées par les goussans (les poètes-chanteurs) ordinaires, errants et incultes ; après avoir narré l’événement, ils mentionnent leur nom dans le dernier couplet. Mais lorsque avec le temps la chanson vieillit, on oublie le nom ou on le confond avec celui d’un autre chanteur, car c’est la chanson elle-même qui intéresse le paysan et non point son auteur ; l’auteur, c’est lui aujourd’hui, demain ce sera un autre. La faculté de la composition est pour lui un don naturel ; tous les paysans savent, tant bien que mal, composer et chanter des chansons. Ils apprennent l’art de la composition au sein de la nature, qui est leur école infaillible.
Les Arméniens des villes appellent rustiques, villageois, les chants populaires, et ils ont raison, car c’est le paysan que crée la chanson, qui compose l’air ; dans la composition d’une chanson, chaque paysan a sa part.
Ce texte du Révérend Père Komitas est paru dans le Mercure Musical en 1907. Il s’agit du premier chapitre d’un article intitulé « La musique rustique arménienne », traduit en français par le poète Archag Tchobanian.
Eugène Lejeune, artiste peintre
Eugène Lejeune est né à Beaumont-les-Autels (Eure-et-Loir) le 15 décembre 1818. Son père, Marie François (15.08.1782, paroisse St Eustache à Paris – 14.01.1864 à Beaumont-les-Autels), est alors maire de Beaumont-le-Chartif où il consigne la naissance de son fils dans le registre communal. Parmi les témoins, le baron Urs Joseph Augustin de Besenval (1776-1836), Lieutenant Colonel du deuxième régiment suisse de la Garde Nationale, veuf depuis 1814 qui en 1825 est propriétaire de la fabrique de faïence dite « de réverbère » de Beaumont-le-Chartif dont Marie François Lejeune est directeur en 1824.
Jean-Baptiste Lejeune, grand-père d’Eugène, était luthier de l’Académie royale de musique. Il exerça son art à Paris, rue Montmartre, de 1775 à 1816. Il était lui même issu d’une famille de luthiers. Les violons Lejeune sont toujours recherchés pour leur qualité.
Eugène est le premier enfant du couple. Sa mère, Anne Victoire née Durand (16.07.1792, paroisse Notre-Dame de Chartres – 09.07.1844 à Chartres) est la fille de l’imprimeur chartrain Jean-François Innocent Durand (28.12.1767, paroisse Ste Foy de Chartres – 27.11.1829 à Chartres) et de Marie Anne Le Tellier (15.12.1770 à Chartres – 21.10.1817 à Chartres) elle-même issue d’une autre famille d’imprimeurs chartrains.
Eugène étudie la peinture dans les ateliers de Paul Delaroche et de Charles Gleyre. Paul Delaroche avait commencé à enseigner en 1832 ou 1833. A la suite d’un bizutage tragique, il dut fermer son atelier en 1843 et c’est Charles Gleyre qui reprit l’atelier. Eugène, devenu artiste peintre, demeure à Paris et expose au Salon à partir de 1845.
Eugène se spécialise dans les portraits, les scènes . Il illustre aussi plusieurs livres. On peut citer à titre d’exemplaires « Reines et rois de France ». Dans les années 1848-1854, il collabore au « Journal des mères et des enfants » fondé par le fouriériste Jules Delbrück (1813-1889). Ce Journal des mères et des enfants divisé en deux parties présente la particularité d’être destiné dans sa première partie (la plus grande) aux enfants et dans sa seconde partie (plus petite) aux parents. Cette revue parut chaque mois de novembre 1848 à octobre 1854 avec de légères modifications du titre. « M. Jules Delbruck, dont le nom se rattache étroitement à la fondation des crèches, l’auteur de la crèche modèle, le savant rédacteur du recueil l’Éducation nouvelle, est un de ceux qui ont le plus fait pour le perfectionnement de l’enfance ; l’attrait, voilà son principe. Transformer les leçons en récréations instructives, c’est la marche dont tous ses écrits tendent à montrer la nécessité aux familles. » (Delasiauve, Journal de médecine mentale, 1866).
Eugène épouse Joséphine Halley (1826 à Cerdon, Ain – 28.01.1879 à Paris 14e). Son prénom bien napoléonien laisse supposer certaines sympathies politiques chez ses parents. Pour l’heure, je n’ai pas réussi à déterminer ni la date et le lieu de leur mariage. Ils auront une fille, Marie Elise (17.10.1853 à Paris 11e – 4.01.1890 à Paris 6e).
En 1861, il demeure rue de l’Ouest à Paris. Eugène est garde national pendant la guerre de 1870-1871.
Le peintre s’éteint à Paris le 8 avril 1894 à l’âge de 75 ans.
Plusieurs musées conservent des oeuvres : au musée de Brest « Intérieur de cuisine », au musée de Chartres « Le Cardinal Pie », « La niche aux lapins », « Michel Chasles », « Adolphe Chasles » et « Pierre Nicole ».
J’ai aussi réuni près de 100 photos de ses oeuvres, études ou gravures qui peuvent être vues ici.